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êtes bloqué?
Un assistant vient vous
aider...
Invocation...
Je
suis l’ami diabolique.
La
muse inventive.
Depuis
toujours je suis là pour t’inspirer, te soigner.
Alors,
aujourd’hui est venu le temps de chanter ma gloire.
***
Il regarda cette page
toujours blanche, la mit en boule et visa la corbeille. Panier
raté, trop plein… Tu m’étonnes, six jours que je ne suis pas sorti. Le sol
était jonché de mégots, de cannettes de sodas, de bouteilles de bière, de
paquets de chips vides. On dirait un lendemain de fête… Et puis,
merde, la fête est finie, j’arrête ! En revanche, en haut, ils n’ont pas
terminé leur boum ! Je croyais que c’était un goûter d’anniversaire… Pas
une boîte de nuit !
Il prit un sac et ramassa les
ordures. Les vestiges d’une semaine de vide total, de gueule de bois, de coups
de gueule…
Créer une chimère, c’est tout
ce qu’on lui demandait… rien de plus. Et pourtant, les mots ne venaient
pas et l’argent disparaissait. « Il te suffit de rêver, lui avait dit son
agent ce matin là. Ce n'est pas plus difficile que ça»… "Ce n'est pas
plus difficile que ça", j’aimerai bien t’y voir moi qu’on rigole deux secondes,
je vais aller me payer un nègre et ça va être vite fait.
« Si tu veux, j’ai reçu
un chargement de champignons hallucinogènes….T’en veux ?
- Mon
génie n’a pas besoin de ça… ».
Il lui avait quand même fourré
le paquet dans sa poche.
Sac poubelle fermé, porte
claquée, ascenseur appelé et pas encore d’idée… Faut que ça vienne, sinon c’est
plus dans ce trou miteux que je vais vivre, c’est dans la rue …
La porte s’ouvrit dans un
grand fracas. Lenny pénétra dans les ténèbres de l’ascenseur, content de
l’obscurité qui lui permettait de ne pas profiter de la crasse ambiante. Une
série de bruits inquiétants, puis l’appareil se mit en branle. Commença une
longue descente, entrecoupée par des petites secousses. Puis tout s’arrêta,
plus un bruit, plus un mouvement.
Quelle idée j’ai eue de
monter dans un ascenseur sans lumière… Les premières minutes ce fut de
l’agacement, des grognements… Vint ensuite, le temps des questions, des
« Combien de temps ça va durer ? », « Ai-je laissé
quelque chose sur le feu ?», et après celui des réponses qui n’en étaient
pas « Personne n’est jamais restée coincé ad vitam aeternam dans un
ascenseur ? Si ? ».
Enfin, il y a eu la faim… Pas
le petit creux. Non, celle qui brûle l’estomac… Celle où votre pauvre panse
crie « FAMINE » dans une série de gargouillis intempestifs.
Lenny chercha dans ses poches, n’importe quoi qui aurait pu arrêter ce concerto
incessant. Eureka ! Des champignons… Ils empestaient et il se souvenait
que d’apparence ils n'étaient guère ragoûtants. Mais dans le noir… Ce n’était
ni des pleurotes, ni des girolles mais ça nourrissait son homme. Trois coups de
mâchoires et le tout fut englouti.
Puis le noir total. On avait
éteint sa lumière intérieure, Lenny était amorphe. Ce fut ensuite comme un
tourbillon de couleur, de sons : de BANG, de BOUM et de BING. Au milieu de
la neige, du déluge, de la pluie, du soleil, du sable et du désert, apparut un
monde nouveau. Un monde qu’on ne pouvait voir qu’à travers ses yeux.
Tiens, un soleil vert. Tout
est tellement plus beau ici, plus lumineux. Il y a des créatures dans le ciel,
des bouledogues avec des ailes d’ange violettes, en plus leurs dents crèvent
les nuages en barbe à papas et ça fait de la pluie, il suffit juste d’ouvrir la bouche pour avoir
un goût sucré sur la langue.
C’est un monde de rêve, où les
lianes des arbres ont des mains et peuvent masser mon dos fourbu, où les
oiseaux couinent Queen -"Show must
go oooon..."- et où les papiers peints ressemblent à des peintures
fauvistes.
Une chose est claire, si c’est
une vision c’est la plus belle de toute, si c’est la réalité, c’est utopique.
Tel que je connais ma muse ce n’est pas son œuvre.
Pour quelques auteurs la muse
n’a pas l’apparence d’une jolie jeune femme. Pour moi, c’est un Monsieur. Un
monsieur avec une dégaine de videur de boîte de nuit. C’est la fête dans ma
cervelle, un festival d’idées. Il faut bien quelqu’un pour gérer tout cela…
faire un tri. Alors Monsieur Muse est là. Ce malabar au crâne rasé a une
particularité : des bras grassouillets qu’il masse avec de la pommade à la rose. Et c’est avec
ceux-ci qu’il brasse savamment toutes mes créations.
*La muse
Ses créations ! Ses
créations !
Mais quelle prétention !
Moi, videur de boîte
crânienne ?
Cette vocation n’est pas mienne !
Qu’on le laisse périr avec sa
poêlée forestière hallucinogène…
Aucunement, cela ne me gêne.
On devrait être plus sélectif
quand on attribue les talents…
Car ce petit génie est trop
suffisant.
***
S’il vous plaît, s’il vous
plaît ! ? Quelqu’un pourrait m’expliquer pourquoi j’ai un zèbre
violet -orange à côté de moi ? Pourquoi, je ne monterai pas sur lui,
histoire de faire une virée ? Avec un chapeau de zebra boy, le fouet à
pâtisserie et en avant toute pour l’aventure. Là, je rencontrerai une jolie amazone…
Quelle est belle ! Elle est comme Monsieur Muse, elle a l’oreille percée,
non pas au niveau du lobe mais du cartilage. Il y a un homme bizarre qui se
balade, très louche. Ces muscles diaphanes laissent passer la lumière orangée
du soir. Dans notre marécage, à mon amazone et moi, il pourrait être la
grenouille sur le nymphéa. Oui, il est comme monté sur ressorts. De belles
cuisses de grenouilles avec quelques champignons qui font voir le monde en
multicolore… Le sale bonhomme pousse des croassements…ou plutôt devrais-je dire
qu’il gémit. Et mon amazone, le regarde un peu trop à mon goût. Elle a des
formes très spéciales : huit ronds, numérotés de un à huit sur lesquels on
peut appuyer.
*La muse
Quel imbécile, en train
d’appuyer sur les boutons de l’ascenseur avec son air énamouré !
Laissez-moi verser une petite
larme… Là, c’est fait.
Si on le laisse continuer, il
va se ridiculiser…
Laissons-le faire quelque chose
de stupide.
Peut-être même se tuer.
***
C’est quoi ce bouton avec une
petite cloche ? Peut-être que son ventre peut faire de la musique… BIP, BIP, BIP. Ce n’est pas très beau ce son.
« Vous êtes bloqué dans
l’ascenseur, un assistant vient vous aider ». Dans la censeur ? C’est
quoi une censeur ? Et depuis quand les ventres d’amazone, ça parle ?
Le monde est une jungle et moi je suis le lion. GRRR, TREMBLE DEMON DE SON
ESTOMAC, TU NE DURERAS PAS LONGTEMPS.
Glouglou… Ca c’est le mien.
J’en ai marre de cette liberté captive. Marre d’être coincé dans cette jungle
où tout est une insulte pour les yeux. Où les bananes sont bleues et les arbres
roses…Où les ventres d’amazone sont tellement boutonneux qu’on dirait des
claviers de machines à calculer et qu’en plus, là dedans, ça parle !
Peut-être qu’elle est enceinte ? D’une fille… Celle qui dit que je suis
coincé dans la censeur. C ’est
pour cela qu’elle raconte n’importe quoi. Elle ne sait pas encore comment est
le monde. Je vais lui montrer comme tout est merveilleux ici… Les bananes qui
ont un goût de fraise, les barbes à papa qui volent dans le ciel. Tous les
enfants aiment les barbes à papa ! Je suis sûr qu’elle les adorera.
« Ma chérie, je vais te
sortir d’ici… Attends un peu. J’arrive. Je vais ouvrir ta Maman… Le problème,
c’est qu’avec mon canif, c’est dur. Ta mère a des vis, je ne peux pas inciser.
Tant mieux tu vas me dire… Les césariennes, ça doit pisser le
sang ! »
*La
muse
Mais regardez-le.
Observez cet esprit dérangé.
C’est le moment de lancer, mon
grain de sel pimenté.
Oh qu’il sera content quand il
verra ce que je fais de sa « fifille »adoré !
Et pour cela, je ne vais pas
beaucoup me fouler.
Quand la chair est déjà là,
c’est l’esprit qu’il faut manier.
***
C’est curieux les entrailles
d’une bonne femme. C’est multicolore. Y a du bleu, du rouge, du vert. Je
croyais que c’était des gros tuyaux plein de sang, qu’on pouvait voir le trajet
des carottes dans l’estomac et de l’eau dans le gosier. Et bien pas du
tout ! Ce sont plein de fils, et le plus joli là-dedans, ce sont les
belles étincelles qui sortent mais elles piquent les doigts et mes cheveux se
dressent sur ma tête. Dans ma salle d’opération, les bonnes femmes ne doivent
pas pleurer, elles savent que tout ira bien.
Ca fait deux heures que j’ai
les mains dans ce cambouis ingérable, dans cette suie dégoutante et le bébé de
Miss Amazone et bien je ne l’ai toujours pas trouvé. Les bonnes femmes de ce
type, il faudrait les livrer avec mode d’emploi. Oui, avec des légendes
explicatives et des schémas parce que là … Et j’ai tout désossé pourtant.
Elle est toute propre de l’intérieur et je peux dire que dans le noir ce n’est
pas facile d’opérer. « SILENCE ! SILENCE ! ou je fais évacuer…
rien du tout ». On crève de chaud, ici .Je suis trempé.
« SILENCE, j’ai dis !
Ce serait possible d’arrêter de geindre ou bien… ? Mais c’est toi mon
bébé… CHUUUT ! Je hais les pleurs. Tu peux m’expliquer ce que tu fais dans
ce coin sombre de la censeur ?
-OUIN OUIN OUIN !
- C’est cela oui… couin, couin,
couin. T’étais bien plus prolixe dans le ventre de ta mère. Je te préférais
dedans d’ailleurs. Il faut dire que tu es bien moche. ».
Devez vous dire que je suis un
père indigne. Même pas sûr que ce soit mon gosse… On n’a aucun air de famille.
Moi, je suis beau et elle… c’est le plus vieux bébé du monde et en plus elle a
une tête de singe, elle est poilue comme un yéti. Je l’appellerai LUCY, comme
sa grande sœur d’il y a des milliards d’années. Quand j’y pense, son père doit
être l’homme aux jambes de grenouilles, lui aussi n’avait pas un physique
facile.
*La muse
Comme c’est mignon de le voir
pouponner,
C’est l’heure de le faire
hurler.
***
« Lucy, reviens-ici tout
de suite ! Sale macaque, tu vas voir ce que je vais faire de
toi ! »
La petite sotte, quand je
l’aurai attrapé, elle va voir ce qu’il va lui arriver. Elle a accroché des
diamants à ses poils de yeti. C’est absolument charmant. Ca fait gling, gling,
gling à chaque fois qu’elle se déplace. En gros, cette enfant est hideuse et
ses goûts aussi. La voilà qui saute maintenant, on dirait un astronaute. C’est
Neil Armstrong sur un pain au chocolat, elle est dans le ciel avec ces diamants
qui font un bruit affreux. Elle brille de milles feux, sa lumière irradie
l’horizon. Elle essaye de se frayer un chemin dans le ciel où les étoiles sont
des sucres d’orges et où il fait très froid. Qu’importe, c’est un yéti.
J’aimerai la suivre, l’attraper et lui montrer qui fait la loi. AHAH ! C’est
mon jour de chance là il y a une trappe qui flotte comme par magie… Là, elle
est ouverte. Encore des fils et des câbles, que des fils et des câbles… Est-ce
une habitude ? Et Lucy, s’envole avec un ballon doré, elle s’éloigne. Pas
grave, je vais la suivre.
Je lui mettrai le grappin dessus quoiqu’il m’en coûte. Je
m’accrocherai à ces câbles et je l’aurai. QUE LA FETE COMMENCE.
*La muse
C’est vrai que c’est du
réchauffé…
Mais il est écrit sur mon CV,
Que la muse des Beatles et
d'Elton John j'ai été,
Et que j’ai aussi créé beaucoup
des tubes de l'été.
Maintenant, l’heure de la chute
a sonné.
***
Je t’ai eu PETIT PRIMATE, comme
promis ! C’est fini maintenant. Tu es atroce, pénible. Je ne tiens pas un
zoo et le rôti de singe c’est très bon. Alors pour l’instant, ton ventre velu
va être mon porte canif et après on verra. D’ailleurs soit dit en passant, ton
pouvoir de téléportation, tu l’as eu où ? A un instant, tu es dans le
ciel, le moment d’après tu te tapis dans ce coin.
Tout se rétrécit… tout se
déforme, tout se décolore. Je tombe, tombe, tombe…
*La muse
Les câbles de l’ascenseur, il a
bousillé
Et un coup du lapin, il va
avoir.
Les auteurs j’adore inspirer,
Car sur eux j’ai le pouvoir.
Et l’ascenseur tomba, tomba,
tomba…
***
Les pompiers ouvrirent avec
difficulté l’ascenseur. Tous les habitants de l’immeuble attendaient, en
pestant contre le mauvais entretien de l’appareil.
On retrouva un ascenseur en
piètre état… Quelqu’un l’avait démonté. Dedans il y avait, gisant sur le sol,
ensanglanté, M.Barr l’écrivain maudit du septième étage et…
« MAIS...C'EST LE DOUDOU
DE MA FILLE!!!! hurla une femme qui venait d'entrer dans l’immeuble. Oui, c’est
lui, je le reconnais, elle l'a emmené au goûter d’anniversaire du huitième
étage. Que lui est-il arrivé?!»
Sa fourrure blanche était
devenue rouge, ses diamants étaient couleur rubis... La pauvre petite chose
avait été lacérée avec un canif...
« Et ma fille...? MAIS OU EST
MA FILLE? », continua-t-elle.
*La muse
Pour chaque créateur je suis là
et j'adore mon boulot...
Mais surtout vous faire passer
pour des zigotos.
Aux artistes j'ai prêté
allégeance
Mais n'oubliez jamais que c'est
moi qui mène la danse.
***
Livia Pinet
1° prix
Livia Pinet
1° prix
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