vendredi 8 juin 2012

Nouvelles primées au concours interne du lycée Fénelon, niveau lycée : Vous êtes bloqué ? Un assistant vient vous aider... de Livia Pinet 1°S4


Vous êtes bloqué?
Un assistant vient vous aider...




Invocation...
Je suis l’ami diabolique.
La muse inventive.
Depuis toujours je suis là pour t’inspirer, te soigner.
Alors, aujourd’hui est venu le temps de chanter ma gloire.
***
Il  regarda cette page toujours blanche, la mit en boule et visa la corbeille. Panier raté, trop plein… Tu m’étonnes, six jours que je ne suis pas sorti. Le sol était jonché de mégots, de cannettes de sodas, de bouteilles de bière, de paquets de chips vides.  On dirait un lendemain de fête… Et puis, merde, la fête est finie, j’arrête ! En revanche, en haut, ils n’ont pas terminé leur boum ! Je croyais que c’était un goûter d’anniversaire… Pas une boîte de nuit !
Il prit un sac et ramassa les ordures. Les vestiges d’une semaine de vide total, de gueule de bois, de coups de gueule…
Créer une chimère, c’est tout ce qu’on  lui demandait… rien de plus. Et pourtant, les mots ne venaient pas et l’argent disparaissait. « Il te suffit de rêver, lui avait dit son agent ce matin là. Ce n'est pas plus difficile que ça»… "Ce n'est pas plus difficile que ça", j’aimerai bien t’y voir moi qu’on rigole deux secondes, je vais aller me payer un nègre et ça va être vite fait.
« Si tu veux, j’ai reçu un chargement de champignons hallucinogènes….T’en veux ?
-          Mon génie n’a pas besoin de ça… ».
Il lui avait quand même fourré le paquet dans sa poche.
Sac poubelle fermé, porte claquée, ascenseur appelé et pas encore d’idée… Faut que ça vienne, sinon c’est plus dans ce trou miteux que je vais vivre, c’est dans la rue …
La porte s’ouvrit dans un grand fracas. Lenny pénétra dans les ténèbres de l’ascenseur, content de l’obscurité qui lui permettait de ne pas profiter de la crasse ambiante. Une série de bruits inquiétants, puis l’appareil se mit en branle. Commença une longue descente, entrecoupée par des petites secousses. Puis tout s’arrêta, plus un bruit, plus un mouvement.
Quelle idée j’ai eue de monter dans un ascenseur sans lumière… Les premières minutes ce fut de l’agacement, des grognements… Vint ensuite, le temps des questions, des « Combien de temps ça va durer ? »,  « Ai-je laissé quelque chose sur le feu ?», et après celui des réponses qui n’en étaient pas  « Personne n’est jamais restée coincé ad vitam aeternam dans un ascenseur ? Si ? ».
Enfin, il y a eu la faim… Pas le petit creux. Non, celle qui brûle l’estomac… Celle où votre pauvre panse crie « FAMINE » dans une série de gargouillis intempestifs. Lenny chercha dans ses poches, n’importe quoi qui aurait pu arrêter ce concerto incessant. Eureka ! Des champignons… Ils empestaient et il se souvenait que d’apparence ils n'étaient guère ragoûtants. Mais dans le noir… Ce n’était ni des pleurotes, ni des girolles mais ça nourrissait son homme. Trois coups de mâchoires et le tout fut englouti.
Puis le noir total. On avait éteint sa lumière intérieure, Lenny était amorphe. Ce fut ensuite comme un tourbillon de couleur, de sons : de BANG, de BOUM et de BING. Au milieu de la neige, du déluge, de la pluie, du soleil, du sable et du désert, apparut un monde nouveau. Un monde qu’on ne pouvait voir qu’à travers ses yeux.
Tiens, un soleil vert. Tout est tellement plus beau ici, plus lumineux. Il y a des créatures dans le ciel, des bouledogues avec des ailes d’ange violettes, en plus leurs dents crèvent les nuages en barbe à papas et ça fait de la pluie,  il suffit juste d’ouvrir la bouche pour avoir un goût sucré sur la langue.
C’est un monde de rêve, où les lianes des arbres ont des mains et peuvent masser mon dos fourbu, où les oiseaux couinent Queen -"Show must go oooon..."- et où les papiers peints ressemblent à des peintures fauvistes.
Une chose est claire, si c’est une vision c’est la plus belle de toute, si c’est la réalité, c’est utopique. Tel que je connais ma muse ce n’est pas son œuvre. 
Pour quelques auteurs la muse n’a pas l’apparence d’une jolie jeune femme. Pour moi, c’est un Monsieur. Un monsieur avec une dégaine de videur de boîte de nuit. C’est la fête dans ma cervelle, un festival d’idées. Il faut bien quelqu’un pour gérer tout cela… faire un tri. Alors Monsieur Muse est là. Ce malabar au crâne rasé a une particularité : des bras grassouillets qu’il masse avec de la pommade à la rose. Et c’est avec ceux-ci qu’il brasse savamment toutes mes créations.

*La muse
Ses créations ! Ses créations !
Mais quelle prétention !
Moi, videur de boîte crânienne ?
Cette vocation n’est pas mienne !
Qu’on le laisse périr avec sa poêlée forestière hallucinogène…
Aucunement, cela ne me gêne.
On devrait être plus sélectif quand on attribue les talents…
Car ce petit génie est trop suffisant.
***

S’il vous plaît, s’il vous plaît ! ? Quelqu’un pourrait m’expliquer pourquoi j’ai un zèbre violet -orange à côté de moi ? Pourquoi, je ne monterai pas sur lui, histoire de faire une virée ? Avec un chapeau de zebra boy, le fouet à pâtisserie et en avant toute pour l’aventure. Là, je rencontrerai une jolie amazone… Quelle est belle ! Elle est comme Monsieur Muse, elle a l’oreille percée, non pas au niveau du lobe mais du cartilage. Il y a un homme bizarre qui se balade, très louche. Ces muscles diaphanes laissent passer la lumière orangée du soir. Dans notre marécage, à mon amazone et moi, il pourrait être la grenouille sur le nymphéa. Oui, il est comme monté sur ressorts. De belles cuisses de grenouilles avec quelques champignons qui font voir le monde en multicolore… Le sale bonhomme pousse des croassements…ou plutôt devrais-je dire qu’il gémit. Et mon amazone, le regarde un peu trop à mon goût. Elle a des formes très spéciales : huit ronds, numérotés de un à huit sur lesquels on peut appuyer.

*La muse
Quel imbécile, en train d’appuyer sur les boutons de l’ascenseur avec son air énamouré !
Laissez-moi verser une petite larme… Là, c’est fait.
Si on le laisse continuer, il va se ridiculiser…
Laissons-le faire quelque chose de stupide.
Peut-être même se tuer.
***

C’est quoi ce bouton avec une petite cloche ? Peut-être que son ventre peut faire de la musique…  BIP, BIP, BIP. Ce n’est pas très beau ce son.
« Vous êtes bloqué dans l’ascenseur, un assistant vient vous aider ». Dans la censeur ? C’est quoi une censeur ? Et depuis quand les ventres d’amazone, ça parle ? Le monde est une jungle et moi je suis le lion. GRRR, TREMBLE DEMON DE SON ESTOMAC, TU NE DURERAS PAS LONGTEMPS.
Glouglou… Ca c’est le mien. J’en ai marre de cette liberté captive. Marre d’être coincé dans cette jungle où tout est une insulte pour les yeux. Où les bananes sont bleues et les arbres roses…Où les ventres d’amazone sont tellement boutonneux qu’on dirait des claviers de machines à calculer et qu’en plus, là dedans, ça parle ! Peut-être qu’elle est enceinte ? D’une fille… Celle qui dit que je suis coincé dans la censeur. C’est pour cela qu’elle raconte n’importe quoi. Elle ne sait pas encore comment est le monde. Je vais lui montrer comme tout est merveilleux ici… Les bananes qui ont un goût de fraise, les barbes à papa qui volent dans le ciel. Tous les enfants aiment les barbes à papa ! Je suis sûr qu’elle les adorera.
« Ma chérie, je vais te sortir d’ici… Attends un peu. J’arrive. Je vais ouvrir ta Maman… Le problème, c’est qu’avec mon canif, c’est dur. Ta mère a des vis, je ne peux pas inciser. Tant mieux tu vas me dire… Les césariennes, ça doit pisser le sang ! »

*La muse
Mais regardez-le.
Observez cet esprit dérangé.
C’est le moment de lancer, mon grain de sel pimenté.
Oh qu’il sera content quand il verra ce que je fais de sa « fifille »adoré !
Et pour cela, je ne vais pas beaucoup me fouler.
Quand la chair est déjà là, c’est l’esprit qu’il faut manier.
***

C’est curieux les entrailles d’une bonne femme. C’est multicolore. Y a du bleu, du rouge, du vert. Je croyais que c’était des gros tuyaux plein de sang, qu’on pouvait voir le trajet des carottes dans l’estomac et de l’eau dans le gosier. Et bien pas du tout ! Ce sont plein de fils, et le plus joli là-dedans, ce sont les belles étincelles qui sortent mais elles piquent les doigts et mes cheveux se dressent sur ma tête. Dans ma salle d’opération, les bonnes femmes ne doivent pas pleurer, elles savent que tout ira bien.
Ca fait deux heures que j’ai les mains dans ce cambouis ingérable, dans cette suie dégoutante et le bébé de Miss Amazone et bien je ne l’ai toujours pas trouvé. Les bonnes femmes de ce type, il faudrait les livrer avec mode d’emploi. Oui, avec des légendes explicatives et des schémas parce que là … Et j’ai tout désossé pourtant. Elle est toute propre de l’intérieur et je peux dire que dans le noir ce n’est pas facile d’opérer. « SILENCE ! SILENCE ! ou je fais évacuer… rien du tout ». On crève de chaud, ici .Je suis trempé.
« SILENCE, j’ai dis ! Ce serait possible d’arrêter de geindre ou bien… ? Mais c’est toi mon bébé… CHUUUT ! Je hais les pleurs. Tu peux m’expliquer ce que tu fais dans ce coin sombre de la censeur ?
-OUIN OUIN OUIN !
- C’est cela oui… couin, couin, couin. T’étais bien plus prolixe dans le ventre de ta mère. Je te préférais dedans d’ailleurs. Il faut dire que tu es bien moche. ».
Devez vous dire que je suis un père indigne. Même pas sûr que ce soit mon gosse… On n’a aucun air de famille. Moi, je suis beau et elle… c’est le plus vieux bébé du monde et en plus elle a une tête de singe, elle est poilue comme un yéti. Je l’appellerai LUCY, comme sa grande sœur d’il y a des milliards d’années. Quand j’y pense, son père doit être l’homme aux jambes de grenouilles, lui aussi n’avait pas un physique facile.

*La muse
Comme c’est mignon de le voir pouponner,
C’est l’heure de le faire hurler.
***

« Lucy, reviens-ici tout de suite ! Sale macaque, tu vas voir ce que je vais faire de toi ! »
La petite sotte, quand je l’aurai attrapé, elle va voir ce qu’il va lui arriver. Elle a accroché des diamants à ses poils de yeti. C’est absolument charmant. Ca fait gling, gling, gling à chaque fois qu’elle se déplace. En gros, cette enfant est hideuse et ses goûts aussi. La voilà qui saute maintenant, on dirait un astronaute. C’est Neil Armstrong sur un pain au chocolat, elle est dans le ciel avec ces diamants qui font un bruit affreux. Elle brille de milles feux, sa lumière irradie l’horizon. Elle essaye de se frayer un chemin dans le ciel où les étoiles sont des sucres d’orges et où il fait très froid. Qu’importe, c’est un yéti. J’aimerai la suivre, l’attraper et lui montrer qui fait la loi. AHAH ! C’est mon jour de chance là il y a une trappe qui flotte comme par magie… Là, elle est ouverte. Encore des fils et des câbles, que des fils et des câbles… Est-ce une habitude ? Et Lucy, s’envole avec un ballon doré, elle s’éloigne. Pas grave, je vais la suivre. Je lui mettrai le grappin dessus quoiqu’il m’en coûte. Je m’accrocherai à ces câbles et je l’aurai. QUE LA FETE COMMENCE.
*La muse
C’est vrai que c’est du réchauffé…
Mais il est écrit sur mon CV,
Que la muse des Beatles et d'Elton John j'ai été,
Et que j’ai aussi créé beaucoup des tubes de l'été.
Maintenant, l’heure de la chute a sonné.
***
Je t’ai eu PETIT PRIMATE, comme promis ! C’est fini maintenant. Tu es atroce, pénible. Je ne tiens pas un zoo et le rôti de singe c’est très bon. Alors pour l’instant, ton ventre velu va être mon porte canif et après on verra. D’ailleurs soit dit en passant, ton pouvoir de téléportation, tu l’as eu où ? A un instant, tu es dans le ciel, le moment d’après tu te tapis dans ce coin.
Tout se rétrécit… tout se déforme, tout se décolore. Je tombe, tombe, tombe…

*La muse
Les câbles de l’ascenseur, il a bousillé
Et un coup du lapin, il va avoir.
Les auteurs j’adore inspirer,
Car sur eux j’ai le pouvoir.
Et l’ascenseur tomba, tomba, tomba…
***

Les pompiers ouvrirent avec difficulté l’ascenseur. Tous les habitants de l’immeuble attendaient, en pestant contre le mauvais entretien de l’appareil.
On retrouva un ascenseur en piètre état… Quelqu’un l’avait démonté. Dedans il y avait, gisant sur le sol, ensanglanté, M.Barr l’écrivain maudit du septième étage et…
« MAIS...C'EST LE DOUDOU DE MA FILLE!!!! hurla une femme qui venait d'entrer dans l’immeuble. Oui, c’est lui, je le reconnais, elle l'a emmené au goûter d’anniversaire du huitième étage. Que lui est-il arrivé?!»
Sa fourrure blanche était devenue rouge, ses diamants étaient couleur rubis... La pauvre petite chose avait été lacérée avec un canif...
« Et ma fille...? MAIS OU EST MA FILLE? », continua-t-elle.

*La muse
Pour chaque créateur je suis là et j'adore mon boulot...
Mais surtout vous faire passer pour des zigotos.
Aux artistes j'ai prêté allégeance
Mais n'oubliez jamais que c'est moi qui mène la danse.
***




Livia Pinet


1° prix

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